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La Première Guerre mondiale 2e partie

 

Année 1914

Les opérations militaires

Aout 1914 : la guerre de mouvement

L'offensive allemande, le coup d'arrêt de la Marne et la course à la mer 

 

 

Albert 1er, roi des belges en 1914

 

 

Le chef d’état-major allemand Helmut von Moltke applique le plan Schlieffen. Le 4 août, l’Allemagne envahit la Belgique et le Luxembourg. L'attaque-éclair en Belgique au début du mois d’août rencontre une résistance acharnée autour de Liège. Les Allemands pénètrent en Belgique près d’Aix-la-Chapelle. Le roi Albert Ier lance un appel à la France et au Royaume-Uni. Il accuse les Allemands de se livrer à des atrocités, d'exécuter des civils et de couper les mains des prisonniers pour qu'ils ne puissent plus se battre. Le 8 août, les troupes françaises entrent à Mulhouse, qui tombe à nouveau aux mains des Allemands deux jours plus tard. La percée en Lorraine, suivant le plan XVII, est un échec pour la France (bataille de Lorraine des 19-20 août) et les IIIe et IVe armées se replient derrière la Meuse. Les Allemands forcent la Vème Armée française au recul lors de la bataille de Charleroi le 23 août. Trois jours auparavant -le 20 août-, les troupes allemandes étaient entrées à Bruxelles. Sur toute la ligne de front belge, les Alliés reculent. Le plan Schlieffen se déroule selon les prévisions.

 

Les Britanniques, dirigés par le général French, et les Français se replient précipitamment, mais en ordre, sur la Marne. Ils sont poursuivis par trois armées allemandes qui parviennent à franchir la rivière, mais ne peuvent isoler l’aile gauche franco-britannique. Joffre, général en chef de l’armée française, parvient à opérer un glissement des troupes vers l’ouest pour éviter la manœuvre de débordement et d’encerclement des armées allemandes. L’attaque de la capitale semble imminente : c’est pourquoi du 29 août au 2 septembre, le gouvernement français quitte Paris et s’installe à Bordeaux, laissant la capitale sous le gouvernement militaire du général Gallieni. Le gouvernement civil exige des militaires que la capitale soit défendue et constitue une armée pour défendre Paris.

 

Mais Paris n’est pas le but des Allemands. Aussi pivotent-ils, toujours conformément au plan Schlieffen, en direction du sud-est pour encercler les armées françaises. Le 4 septembre, l’armée allemande occupe Reims. Le commandement voit là l’occasion d’attaquer les Allemands sur leur flanc. L’armée française fait demi-tour le 6 septembre et repart à l’attaque. Des renforts sont envoyés de Paris grâce à la réquisition de taxis parisiens. C’est la Première victoire de la Marne (6-9 septembre). Après 4 jours de combats acharnés, les armées allemandes sont stoppées et reculent. L’ensemble des forces allemandes se replie sur l’Aisne puis se fixe le long des Ardennes et de l’Argonne. En raison de l’échec du plan allemand et de la victoire française, Erich von Falkenhayn prend la tête de l’état-major allemand, le 14 septembre, en remplacement de von Moltke. Le 5 octobre, le conflit connaît ses premiers duels aériens près de Reims où un biplace Aviatik allemand est abattu à la carabine par les aviateurs français Frantz et Quenault.

 

Au nord-ouest du front, le 19 octobre, la « course à la mer » débute entre les armées allemandes, française et britannique. Chaque camp cherche à déborder l’autre par le nord et à arriver en premier à la mer. Les Allemands souhaitent atteindre les ports de Dunkerque, de Boulogne-sur-Mer et de Calais pour couper les Anglais de leurs bases d’approvisionnement et ainsi les contraindre à se rendre. Mais ils échouent à s’emparer des ports français de la Manche, grâce aux inondations provoquées par les Belges dans la région de l’Yser. Les Britanniques avancent jusqu’à Ypres, à l’extrémité sud-ouest de la Belgique. Ils sont peu nombreux mais comme les soldats anglais sont des professionnels, ils combattent mieux que les Allemands. Après avoir pris Anvers le 10 octobre, les Allemands tentent une percée lors de la sanglante bataille des Flandres, en novembre, mais ils se heurtent à la résistance des troupes alliées commandées par Joffre. Le 27 octobre, les Allemands lancent une vaste offensive en Belgique déclenchée au nord, à l’est et au sud d’Ypres.

 

Le 3 novembre, l'Amirauté britannique fait miner la mer du Nord déclarée « zone de guerre ». Le Royaume-Uni fait confiance en sa marine pour protéger le pays et établir un blocus économique. Il ne possède en effet qu’une armée de métier de 250 000 hommes dispersés à travers le monde, dont 60 000 seulement sont prêts à partir pour la France.

 

En décembre, les armées alliées contre-attaquent sur toute la longueur du front allant de Nieuport à l’ouest jusqu’à Verdun à l’est, mais ne gagnent aucune victoire décisive. La « mêlée des Flandres » marque la fin de la guerre de mouvement et des combats à découvert sur le front occidental, qui se stabilise sur près de 800 km, de la Suisse à la mer du Nord. À la fin de 1914, les deux camps creusent des tranchées. La guerre de mouvement a échoué. Commence alors une terrible attente, celle d'une offensive qui rompra le front.

 

Le front Est

 

Troupes russes se rendant au front

 

Sur le front oriental, suivant les plans des Alliés, le tsar lance l’offensive en Prusse-Orientale le 17 août, plus tôt que prévu par les Allemands. En août, deux armées russes pénètrent en Prusse-Orientale et quatre autres envahissent la province autrichienne de Galicie après les victoires de Lemberg, en août et septembre. Les armées russes sèment la terreur en Prusse et sont accusées d'assassinats et de viols par la propagande allemande. Face aux armées autrichiennes mal équipées, les armées russes avancent régulièrement. Elles s’emparent de Lvov (3 septembre) et de la Bucovine et repoussent les Autrichiens dans les Carpates, où le front se stabilise en novembre.

 

Face aux Allemands, les Russes remportent une victoire à Gumbinnen (19-20 août) sur les forces de la huitième armée allemande, inférieures en nombre. Ceux-ci sont sur le point d’évacuer la région lorsque des renforts commandés par le général Paul von Hindenburg remportent sur les Russes une victoire décisive lors de la bataille de Tannenberg (27-30 août 1914), confirmée lors de la bataille des lacs Mazures en Prusse-Orientale, le 15 septembre, ce qui oblige les Russes à battre en retraite vers leur frontière. Les Allemands stoppent définitivement les offensives russes en Prusse (fin le 31 août). Le même jour, les Russes écrasent les Autrichiens lors de la bataille de Lemberg qui s’achève le 11 septembre. Le 20 octobre, au cours de la Bataille de la Vistule, les Allemands battent en retraite devant les Russes dans la boucle de la Vistule. Au début du mois de novembre, Hindenburg devient commandant en chef des armées allemandes sur le front Est. Il est considéré comme un héros et ses avis sont toujours écoutés par le Kaiser.

 

Sur le front Sud-est, les Autrichiens tentent à trois reprises d’envahir la Serbie, mais ils sont repoussés et subissent une défaite à Cer, le 24 août. Les Serbes reprennent Belgrade le 13 décembre. Et enfin, entre le 29 octobre et le 20 novembre, les Turcs bombardent les côtes russes de la mer Noire. L’Empire ottoman rejoint les Allemands et les Autrichiens dans la guerre.

 

Mondialisation du conflit

 

 

 Le 1er novembre 1914, les autorités turques déclarent officiellement la guerre contre les pays de la Triple-Entente.

 

Peu à peu, le conflit se mondialise. Le Japon, en tant qu’allié du Royaume-Uni, déclare la guerre à l’Allemagne le 23 août 1914, mais sa participation au conflit se limite à l’occupation des colonies allemandes de l’océan Pacifique (îles Marshall, Carolines et Mariannes) et des concessions allemandes de Chine (Shandong). Il profite du conflit pour renforcer ses positions face aux grandes puissances européennes en Asie.

La Turquie entre en guerre contre les pays de la Triple-Entente le 1er novembre 1914, en tant qu’alliée de l’Allemagne. La motivation principale de la Turquie dans cette guerre est de combattre la Russie tsariste qui cherche à prendre le contrôle des détroits.

L’Italie, bien que membre de la Triplice, déclare la guerre à l’Autriche-Hongrie en mai 1915 après bien des hésitations. En août 1914, elle s’était prudemment déclarée neutre. Sollicitée par les deux camps, elle finit par pencher du côté des pays de la Triple-Entente. En effet, par le traité secret de Londres d’avril 1915, la France et le Royaume-Uni lui promettent qu’une fois la victoire acquise, elle bénéficierait de larges compensations territoriales, à savoir : les terres irrédentistes mais aussi une zone d’influence en Asie Mineure et en Afrique.

La Bulgarie, initialement neutre mais sollicitée par les deux camps, s’engage finalement aux côtés des puissances centrales en octobre 1915, à un moment où celles-ci semblent l’emporter sur le front des Balkans. Pour enlever l'adhésion des Bulgares, ces derniers n'avaient pas hésité à leur promettre en cas de victoire, la cession de la Macédoine serbe, la Dobroudja roumaine, ainsi qu'un accès à la Mer Adriatique, que Sofia justement revendiquait.

 

Le Portugal entre en guerre aux côtés de l’Entente en mars 1916 pour consolider sa position en Europe et préserver ses colonies, convoitées par l’Allemagne. La Roumanie déclare la guerre à l’Allemagne en août 1916, après la contre-offensive russe victorieuse sur le front oriental laissant espérer une défaite de l’Autriche-Hongrie. Elle revendique la Transylvanie hongroise. En 1914, la Grèce reste neutre, puis elle rejoint l’Entente en déclarant la guerre à la Bulgarie en novembre 1916, puis à l’Allemagne en juin 1917 après l’abdication et l’exil du roi Constantin.

Fortement marqués par le torpillage du paquebot Lusitania par les sous-mariniers allemands en 1915, et notamment après la décision de reprise des torpillages des navires neutres par l'Allemagne prise en janvier 1917, les États-Unis déclarent la guerre à l’Allemagne le 6 avril de cette même année. Cette entrée en guerre, quoique tardive et malgré le retrait russe de la guerre suite à la révolution bolchévique, fut décisive. Sachant que les colonies participèrent également à l’effort de guerre des métropoles européennes, la guerre est désormais mondiale.

 

La trêve de Noël

Les soldats du front occidental étaient épuisés et choqués par l'étendue des pertes humaines qu'ils avaient subies depuis le mois d'août. Au petit matin du 25 décembre, les Britanniques qui tenaient les tranchées autour de la ville belge d'Ypres entendirent des chants de Noël venir des positions ennemies, puis découvrirent que des arbres de Noël étaient placés le long des tranchées allemandes. Lentement, des colonnes de soldats allemands sortirent de leurs tranchées et avancèrent jusqu'au milieu du no man's land, où ils appelèrent les Britanniques à venir les rejoindre. Les deux camps se rencontrèrent au milieu d'un paysage dévasté par les obus, échangèrent des cadeaux, discutèrent et jouèrent au football. Ce genre de trêve fut courant là où les troupes britanniques et allemandes se faisaient face, et la fraternisation se poursuivit encore par endroits pendant une semaine jusqu'à ce que les autorités militaires y mettent un frein. Cet événement fut à l'origine du film Joyeux Noël de Christian Carion, sorti en 2005.

 

Année 1915

 

 

Avril : l'Italie entre en lice et rejoint les Alliés dans la lutte.

 

Le front Ouest

 

L’année 1915 commence avec une innovation technique à l’Ouest. Le 19 janvier, un zeppelin effectue le premier bombardement aérien de civils au Royaume-Uni ainsi que le 21 mars où ce même dirigeable bombarde Paris. Pendant toute la guerre, les dirigeables vont terroriser les citadins français et anglais. Le 21 janvier, les Russes réalisent une offensive dans les Carpates et 3 jours plus tard, la flotte britannique ressort victorieuse face à l’escadre allemande près du Dogger Bank, en mer du Nord. En février, les premiers avions armés d’une mitrailleuse, les Vickers F.B.5, équipent une escadrille de chasse britannique du Royal Flying Corps. Le gouvernement allemand proclame « zone de guerre » les eaux territoriales britanniques et c’est le début de la guerre sous-marine. Le 1er mars, les Alliés étendent le blocus à la totalité des marchandises allemandes.

 

 

Ainsi la guerre devient une guerre d’usure, qui met à l’épreuve tant les forces morales que matérielles des combattants. Les états-majors veulent « saigner à blanc » les armées adverses. Pour soulager les Russes, qui doivent faire face à une grande offensive des puissances centrales, les Turcs étant également passés à l’attaque au Caucase, Français et Britanniques lancent assaut sur assaut en Artois, puis en Champagne, le 16 février. Quatre jours plus tard, Reims est bombardée par les Allemands. Enfin, le 16 mars, la bataille de Champagne est terminée : la tentative de percée française est un échec. Ces offensives de 1915 réussissent à bousculer quelque peu les dispositifs allemands au prix de pertes effroyables. Le haut-commandement allié déplore l’insuffisance des moyens d’attaque et particulièrement en artillerie lourde, domaine dans lequel l’Allemagne possède une supériorité incontestable depuis le début de la guerre.

 

Le 22 avril, une nouvelle arme apparait : les gaz asphyxiants sont utilisés à Strenstraate et à Ypres par les Allemands. L’effet est immédiat et foudroyant. Mais jamais les Allemands ni les Alliés, qui l’essaient à leur tour, ne procèdent à une utilisation systématique. Contrôlant mal le mouvement des vents, les uns et les autres avaient peur que les nappes ne se retournent, et les soldats ne sont pas équipés pour occuper les zones infectées. Aussi, l’emploi des gaz ne permit jamais de remporter plus qu’un succès local.

 

 

Le 26 avril, le pacte de Londres entre les membres de l’Entente est signé et l’Italie s’engage à entrer en guerre contre les Empires centraux dans un délai d’un mois. Les Alliés acceptent les revendications du 9 mars. Au bout d'une vive campagne des « interventionnistes » pour l'entrée en guerre de l'Italie, lancée en particulier par le discours du 5 mai 1915 de Gabriele D'Annunzio, Rome entre en guerre le 23 mai. La décision a été prise par trois hommes : le roi d'Italie, Victor-Emmanuel III, le président du Conseil, Antonio Salandra et le ministre des Affaires étrangères, Sidney Sonnino.

 

Pour la première fois de la guerre, les pays en guerre vont mobiliser toutes leurs ressources : humaines, économiques et financières, dans la conduite d’un conflit total.

L’organisation en armées, corps d'armée, divisions, brigades, régiments, bataillons, compagnies, sections et escouades est relativement similaire dans les deux camps. La dotation et la répartition en matériel et en armes sont pratiquement identiques. Toutefois, la France a privilégié l’offensive et possède une artillerie plus légère fondée, notamment, sur le canon de 75, afin de favoriser les mouvements. L’Allemagne possède une artillerie plus lourde et à plus longue portée, favorisée notamment par ses capacités de production et capable de mener des combats plus défensifs. Ces choix ont une importance non négligeable au début de la guerre et la différence n’est comblée qu’au début de 1916.

Les 11 mars et 10 avril, les gouvernements britannique et français donnent leur accord sur le principe d’une annexion de Constantinople par la Russie. Deux semaines plus tard, le 24 avril, plus de 600 intellectuels arméniens de Constantinople sont arrêtés et déportés par les Jeunes-Turcs, date symboliquement considérée comme marquant le début du génocide arménien.

 

La guerre à l’Est

Lawrence d’Arabie fomente pour le compte des Britanniques le soulèvement des tribus arabes pour gêner les Turcs.

Avec l’aide bulgare, les austro-allemands réussissent à occuper toute la Serbie en 1915, contraignant l’armée royale serbe à traverser le pays pour trouver refuge à Corfou.

 

 

Troupes britanniques lors du débarquement à Gallipoli en mai 1915.

 

Au lieu de se heurter au gros des troupes ennemies là où elles étaient bien organisées, installées dans un réseau savant de tranchées, l’état-major des Alliés décide de porter ses coups sur des points de défense plus vulnérables, ceux de l'allié turc de l'Allemagne. Le 25 avril 1915, un corps expéditionnaire allié débarque aux Dardanelles. Le contrôle des détroits permettrait à la France et au Royaume-Uni de ravitailler la Russie et d’encercler les Empires centraux. Cette idée, défendue notamment par le chef de l’Amirauté britannique, Winston Churchill, débouche sur un débarquement à Gallipoli de troupes essentiellement constituées d’Australiens et de Néo-Zélandais. Malgré le courage des soldats de l’ANZAC, les Alliés ne parviennent pas à pénétrer par surprise dans l’Empire ottoman et échouent dans leurs offensives successives. L’entreprise coûte 145 000 hommes aux Alliés et elle est un échec total. Les rescapés sont débarqués à Salonique, au mépris de la neutralité grecque pour aider les Serbes menacés par les puissances centrales. Le corps expéditionnaire constitue l’Armée d'Orient. Cette armée soutient ensuite les Serbes et participe à l’effondrement de l’empire austro-hongrois en 1918.

 

Après la stabilisation des fronts, les Allemands reprennent l’initiative sur le front russe. Le 7 février 1915, les Allemands lancent une offensive au sud-est des lacs de Mazurie, dirigée par Hindenburg. Les Russes sont encerclés et se replient sur le Niémen. Les Allemands remportent des succès spectaculaires, occupant toute la Pologne, la Lituanie et une partie de la Lettonie. Faute de munitions et d’artillerie lourde, les Russes n’ont pu tenir tête ; ils perdent près de 2 000 000 d'hommes, une catastrophe qui, à long terme, ébranle le régime. Il n’en paraît pourtant rien puisque les Russes se replient en bon ordre sur des positions retranchées.

 

Année 1916

 

 

Soldats français du 87e régiment près de Verdun (France) en 1916.

 

Au début de l’année 1916, le commandement allemand décide d’user complètement l’armée française en l’obligeant à s’engager à fond. Il choisit d’attaquer Verdun, un pivot du front fortifié que les Français voudront défendre coûte que coûte[73]. Le site offre la possibilité d’attaquer les lignes françaises de trois côtés. De plus, l’armée allemande bénéficie, contrairement aux Français, de nombreuses voies ferrées qui facilitent les approvisionnements en matériel et en hommes. Enfin, les manœuvres d’approche peuvent se dérouler dans une relative discrétion à l’abri du manteau forestier. Dans l’esprit du haut commandement allemand, « il ne s’agissait pas essentiellement de prendre Verdun, mais de fixer les forces françaises, de les attirer sur ce champ de bataille qu’elles défendraient pied à pied, de saigner à blanc l’armée française grâce à la supériorité en artillerie ». Exsangue, l’armée française serait incapable de mener à bien l’offensive prévue sur la Somme.

 

Le lundi 21 février, après une courte mais violente préparation d’artillerie, le commandement allemand lance une attaque avec trois corps d’armée. Les deux divisions françaises qui défendent les seize kilomètres de la première ligne sont submergées. Très vite, le commandant de la IIe Armée, Philippe Pétain, organise la riposte. Il met en place une liaison avec Bar-le-Duc, à l’arrière. En 24 heures, 6 000 camions montent vers le front en empruntant cette route devenue la Voie sacrée. L’assaut allemand est repoussé et la brèche colmatée. Mais les attaques vont se renouveler pendant plusieurs mois, sans cesse contenues. Le 6 mars, les Allemands lancent une nouvelle attaque à Mort-Homme. « On les aura ! » écrit Pétain dans le célèbre ordre du jour du 10 avril. Il obtient que ses troupes soient régulièrement renouvelées avant qu’elles ne soient trop éprouvées. C’est le « tourniquet », où toute l’armée française connait l’enfer de Verdun. Le déclenchement de l’offensive de la Somme en juillet et une nouvelle offensive des Russes sur le front oriental obligent les Allemands à relâcher leur pression sur Verdun. En décembre, Mangin reprend les forts perdus. Près de 700 000 combattants français ou allemands sont morts sur ce champ de bataille.

 

Entre le 1er juillet et 18 novembre 1916 a lieu la bataille de la Somme. Les troupes anglaises et françaises attaquent et tentent de percer les lignes de défense fortifiées allemandes au nord de la Somme sur une ligne nord-sud de 45 km. L’offensive est précédée par une intense préparation d’artillerie. Pendant une semaine, 1,6 million d’obus tombent sur les lignes allemandes. Les Alliés sont persuadés d’avoir liquidé toute résistance du côté ennemi. L’offensive de la Somme, au départ offensive de rupture, se transforme progressivement en une guerre d’usure. La plupart des soldats anglais sont des engagés volontaires qui n’ont aucune expérience du feu. Dès les premières minutes, ils succombent en grand nombre dans les barbelés qui séparent les ennemis. Les soldats des deux bords ont l’impression de vivre en enfer. Les débauches d’artillerie empêchent toute percée d’aboutir. Les soldats combattent souvent pour quelques mètres et n’arrivent pas à percer les tranchées ennemies protégées par un tir nourri d’artillerie et des lignes de barbelés. Le bilan de la bataille de la Somme est très lourd. 650 000 alliés, principalement des Britanniques, et 580 000 hommes du côté allemand sont hors de combat, tués, blessés ou disparus. Les troupes alliées n’avancent que de 13 km sur un front de 35 km de long.

 

L’année 1917

 

Le front de l'ouest

 

Infanterie australienne en 1917 dans les tranchées portant des masques à gaz

 

1917 connaît une crise qui affecte tous les secteurs. Malgré les échecs des batailles de Verdun et de la Somme, le général Nivelle élabore un nouveau plan d’attaque frontale qui doit être le dernier. Il choisit un secteur situé entre Reims et Soissons : le Chemin des Dames, qu’il estime mal défendu. Pendant six semaines, de début avril à la mi-mai, des assauts successifs tentent de conquérir ce site. Pendant le premier assaut, 40 000 Français tombent sous le feu infranchissable des mitrailleuses allemandes. L’attaque n’avait rien d’une surprise. Les Allemands avaient appris par des prisonniers la prochaine offensive contre leur site et avaient grandement amélioré leurs positions en plaçant davantage de mitrailleuses, en construisant des souterrains de protection et des abris souterrains à 10 ou 15 m de profondeur. En tout, 270 000 soldats français périssent.

 

 

Photo de Pétain, lequel a remédié aux mutineries de 1917.

 

L’échec de l’offensive du Chemin des Dames a pour conséquence immédiate les mutineries qui s'élèvent contre les conditions de combat et non contre le fait de combattre en lui-même. Parmi les 40 000 mutins, il n’y pas de désertion, ni de fraternisation avec l’ennemi. Ils restent dans leur cantonnement et refusent de monter en ligne. Ils insultent les officiers qu’ils jugent incompétents. Les mutins sont punis avec une relative modération par Pétain, devenu le général en chef des armées françaises à la place de Nivelle. Il y a 629 condamnations à mort et finalement 75 exécutions. Pétain tente de mettre fin au mécontentement des soldats en améliorant leur vie quotidienne par le repos, la nourriture et le rythme des permissions. Il décide aussi de ne plus lancer les hommes à l’attaque tant qu’il ne disposerait pas d’une supériorité absolue en matériel. En effet, l’entrée en guerre des Américains aux côtés des alliés français et britanniques en avril 1917 laisse espérer un retournement de la situation. Toutefois, le commandement français n’ose plus lancer les hommes à l’attaque tant qu’il ne dispose pas d’une supériorité absolue en matériel grâce aux Américains et aux chars de combat. Pourtant, impatient de remporter un succès qui lui soit propre, l’état-major anglais lance une offensive à Passchendaele, dans les Flandres, à l’automne 1917. Il réussit seulement à mener à une mort inutile plusieurs centaines de milliers de Britanniques et d’Allemands.

 

En mars 1917, l’état-major impérial allemand prend la décision stratégique de reculer le front plus au nord, sur la « ligne Hindenburg », et fait évacuer toutes ses armées des positions occupées depuis 1914 dans le secteur de l’Aisne. Les Allemands dynamitent systématiquement les édifices emblématiques des villes et villages auparavant occupés. Ainsi disparaissent notamment les forteresses de Ham (Somme), située non loin de là, et de Coucy (27 mars 1917). Ce recul permet de raccourcir le front et d’économiser les forces nécessaires à sa défense. Les seules offensives alliées victorieuses de 1917 ont lieu autour d’Arras et d’Ypres en avril et juin 1917, lorsque les troupes britanniques et du Commonwealth prennent quelques villages aux Allemands. La prise de Vimy par les Canadiens le 9 avril 1917 est devenue un symbole de la force du Canada et de la capacité des Canadiens de gagner un objectif sans l’aide des Britanniques.

 

Au sud, les forces italiennes et autrichiennes s’affrontent sans résultat depuis deux ans et demi sur le front d’Isonzo au nord-ouest de Trieste, avec un léger avantage pour l'armée italienne qui, en 1916, avait conquis la ville de Gorizia lors d'une contre-offensive. Les Italiens avaient pénétré aussi de quelques kilomètres dans le Tyrol, mais sans résultats majeurs. Cet équilibre est rompu à l'automne 1917 lorsque les Allemands décident de soutenir leurs alliés autrichiens sur le front italien et envoient 7 divisions. Le 14 octobre 1917, lors de la bataille de Caporetto, les soldats italiens reculent devant l'offensive austro-allemande. Plus de 600 000 soldats italiens, fatigués et démoralisés, désertent ou se rendent. L’Italie vit sous la menace d’une défaite militaire totale. Mais le 7 novembre, les Italiens parviennent à arrêter l'avancée des austro-allemands sur la ligne du Piave, à environ 110 kilomètres du front d’Isonzo. La défaite italienne de Caporetto incite la France et le Royaume-Uni à envoyer des renforts et à mettre en place le Conseil suprême de guerre pour coordonner les efforts de guerre des Alliés.

 

La guerre sous-marine et l'entrée en guerre des États-Unis

En 1917, sous la pression des militaires, et notamment de l’amiral Tirpitz, le Kaiser se décide à pratiquer la guerre sous-marine à outrance, c’est-à-dire couler tous les navires se rendant au Royaume-Uni, même les neutres. Les Allemands espèrent ainsi étouffer l’économie britannique et la contraindre à se retirer du conflit. En avril 1917, les sous-marins allemands ont déjà coulé 847 000 tonnes, soit l’équivalent du quart de la flotte commerciale française. Toutefois, l’organisation de convois sous la protection de la marine anglaise et le dragage des mines réussissent à émousser l’arme sous-marine. En fin de compte, au lieu de faire baisser pavillon au Royaume-Uni et de terroriser les neutres, la guerre sous-marine à outrance provoque l’intervention américaine.

 

 

De plus, le Royaume-Uni demande l’aide du Japon. Le croiseur Akashi et huit destroyers sont envoyés à Malte, chiffre qui est porté par la suite à 17 navires, sans compter les navires à commandement mixte. Cette flotte d’escorte et de soutien protège les convois alliés en Méditerranée et permet aux troupes alliées d’être acheminées d’Égypte vers Salonique et Marseille, pour prendre part à la grande offensive de 1918. Le destroyer Matsu a sauvé plus de 3 000 soldats et membres d’équipage du navire de transport Transylvania, torpillé au large des côtes françaises. En tout, le Japon a escorté 788 bateaux en Méditerranée, dont 700 000 hommes de troupes du Commonwealth britannique.

 

 

 

Pendant la Première Guerre mondiale, l'US Army publie une affiche de recrutement mettant en vedette l'Oncle Sam. Le texte I want you for U.S. Army peut se traduire par Je te réclame pour l'armée américaine.

 

En août 1914, les États-Unis, très isolationnistes, restent neutres malgré les liens privilégiés avec des pays de l’Entente, en particulier le Royaume-Uni. Le blocus imposé par la flotte des pays de l’Entente met quasiment fin aux échanges entre les États-Unis et l’Allemagne. Dans le même temps, les liens financiers et commerciaux entre les États-Unis et les pays de l’Entente ne cessent de croître. Le torpillage du paquebot britannique Lusitania le 7 mai 1915, a tué 128 ressortissants américains, ce qui émeut l’opinion américaine et la fait basculer en faveur de la guerre.

 

Les maladresses de la diplomatie allemande aident son revirement : en janvier 1917, le ministre-conseiller Zimmermann n’hésite pas à promettre au Mexique l’alliance de l’Allemagne contre les États-Unis avec, pour salaire de la victoire, le retour des provinces perdues (Texas, Arizona et Nouveau-Mexique). Cette intervention du Kaiser dans les affaires américaines suscite l’indignation. Le congrès américain décide l’entrée en guerre contre les empires centraux. Le président Woodrow Wilson fixe dès janvier 1918 ses objectifs de paix. Plusieurs pays d’Amérique latine s’engagent aussi dans le conflit aux côtés de l’Entente.

Comme le Royaume-Uni, les États-Unis disposent uniquement d’une armée de métier. Ainsi, lorsque la proposition de guerre du président Wilson devant le Congrès le 2 avril est acceptée, et que les États-Unis entrent en guerre le 6, le président américain doit compter majoritairement sur la base du volontariat pour constituer la force de 1,2 million d’hommes qui n’arrivera en France qu’à partir du mois d’octobre 1917. C’est la fameuse campagne d’affichage ayant pour symbole l’Oncle Sam pointant son index vers le lecteur.

Le corps militaire américain établit ses premiers campements autour de Nantes et de La Rochelle en octobre 1917. L’uniforme américain est vert, complété par un casque en forme de cercle tout comme le modèle anglais. C’est enfin une armée qui contribuera grandement à la victoire sur les Empires centraux, puisque lorsque la contre-attaque générale est lancée par le maréchal Foch en 1918, les GI ne représentent pas moins de 31 % des forces combattantes alliées. Au total, 2 millions de militaires américains seront en Europe au moment de l’armistice.

 

Le front Est et l'Empire ottoman

La Russie ne peut pas soutenir une guerre contre un ennemi mieux équipé et mieux organisé. L’effort que demande une guerre, production industrielle et agricole accrue, engendre un rationnement de la population et des troubles sociaux. Au début de l’année 1917, la Russie est épuisée, les désertions se multiplient et les villes connaissent des troubles d’approvisionnement qui rendent la situation explosive. Il suffit de peu pour que tout éclate. En mars 1917, une première révolution éclate. Elle porte au pouvoir la bourgeoisie libérale qui entend continuer la guerre alors que les soviets, de plus en plus influents, exigent la paix. Mais la Russie n’est plus une force d’attaque et les Alliés craignent une intensification de l’effort allemand à l’ouest. En octobre, Lénine organise la seconde révolution et lance des pourparlers de paix menant à l’armistice en décembre.

Le ministre des Affaires étrangères britannique, Lord Arthur Balfour, promet l’établissement d’un État juif en Palestine entre autres pour motiver les Juifs américains à soutenir l’entrée en guerre des États-Unis. La même année, les Britanniques attaquent la Palestine, dont ils gardent le contrôle jusqu’en 1947. De nombreux Juifs s’y installeront après les épreuves de la Seconde Guerre mondiale.

 

L’année 1918

 

 

Troupes françaises sous le commandement du général Gouraud, avec leurs sulfateuses parmi des ruines d'une cathédrale près de la Marne, repoussant les Allemands. 1918

 

Début 1918, les Alliés perdent un front avec la sortie du conflit de la Russie. La Russie bolchevique signe le traité de Brest-Litovsk (négociée par Léon Trotsky) en mars 1918. L’Allemagne reçoit un « train d'or » (le contenu de celui-ci est confisqué à l’Allemagne par le traité de Versailles), occupe la Pologne, l’Ukraine, la Finlande, les Pays baltes et une partie de la Biélorussie. Les Allemands profitent aussi de cette défection pour envoyer d’importants renforts sur le front Ouest et tenter d’obtenir une victoire rapide avant l’arrivée effective des Américains. C’est le retour de la guerre de mouvement.

 

 

Territoire occupé par les puissances centrales après le traité de Brest-Litovsk, signé en mars 1918.

 

Le haut commandement allemand (maréchal Hindenburg et quartier maître général Erich Ludendorff) sait qu’il dispose d’un délai de quelques mois — jusqu’à juin-juillet 1918 — pour remporter une victoire décisive sur les troupes alliées. Renforcés par les troupes venant du front est, et souhaitant forcer la décision avant l’arrivée des troupes américaines, les Allemands mettent toutes leurs forces dans d’ultimes offensives à l’ouest. Le commandement allemand décide de lancer une série de coups de boutoir contre les Anglais, particulièrement éprouvés depuis Passchendaele. Ils portent l’effort à la jonction du front français : connaissant la mésentente entre Haig et Pétain, ils espéraient en jouer. Il s’en faut de peu que les lignes anglaises ne soient emportées lors de l’offensive du 21 mars, dans la région de Saint-Quentin. Pétain n’envoie pas de renforts et il faut l’autorité de Clemenceau et de Foch pour amener Fayolle au secours des Anglais et sauver la situation. Une offensive contre les Français, le 27 mai, au Chemin des Dames, amène l’armée allemande à la hauteur de Reims et de Soissons, soit une avancée de 60 kilomètres.

 

Paris est de nouveau à la portée des canons allemands à longue portée. Pourtant, la rupture décisive du front allié n’étant pas atteinte, le haut commandement allemand envisage alors un ultime effort et souhaite le diriger à l’encontre des troupes britanniques, réputées plus affaiblies afin de les rejeter à la mer en les coupant de l’armée française. Cette offensive doit être précédée par une offensive contre l’armée française afin d’immobiliser les réserves de celle-ci pour l’empêcher de secourir ensuite l’armée britannique. Lancée le 15 juillet 1918 par les troupes allemandes en Champagne, cette offensive préliminaire de « diversion » permet de mettre en œuvre pour la première fois à cette échelle la tactique de la zone défensive (formalisée par le général Pétain depuis près d’une année) qui va permettre de faire échec aux visées allemandes. Les troupes allemandes pénètrent en effet les premières lignes françaises, dont les forces organisées en profondeur, avec des môles de résistance, opposent un feu meurtrier. La progression des troupes allemandes est importante, et elles franchissent la Marne (seconde bataille de la Marne après celle de septembre 1914). Aventurées très au sud et disposées en pointe sans se prémunir contre des attaques sur ses flancs, les troupes allemandes sont bousculées par la contre-attaque française dans la région de Villers-Cotterêts, entamée le 18 juillet 1918. Les résultats de cette contre-attaque sont dévastateurs pour ces troupes allemandes qui doivent refluer vers le nord en évitant de justesse l’encerclement.

 

Derniers instants et armistices

 

Sous-marin allemand (Untersee boot) en reddition à Londres en 1918.

 

À compter de cette date, l’armée allemande n’est plus jamais en mesure d’engager une action offensive, l’initiative étant désormais dans le seul camp des Alliés qui vont engager dans les mois suivants des contre-attaques permettant de regagner le terrain perdu au cours du printemps 1918 puis des contre-offensives majeures. La grande offensive victorieuse a lieu le 8 août 1918. Les soldats canadiens, soutenus par les Australiens, les Français et les Britanniques, lancent une attaque en Picardie et enfoncent les lignes allemandes. Plus au sud, les soldats américains et français se lancent aussi dans l'offensive Meuse-Argonne, victorieuse. Pour la première fois, des milliers de soldats allemands se rendent sans combat. Les troupes allemandes ne peuvent résister aux armées alliées maintenant coordonnées par le général Foch. Ces dernières sont renforcées chaque jour davantage par le matériel et les soldats américains, par les premiers chars Renault FT-17 et par une supériorité navale et aérienne.

 

L’armistice est demandé par les Bulgares le 26 septembre. L’armée turque est anéantie par les Anglais lors de la bataille de Megiddo. Les généraux allemands, conscients de la défaite de l’Allemagne à terme, ne songent plus qu’à hâter la conclusion de l’armistice. Ils voudraient le signer avant que l’adversaire ne mesure sa victoire avec exactitude, avant qu’il ait reconquis le territoire français.

 

Sur le front italien, au printemps 1918, l'armée austro-hongroise essaie de forcer les lignes italiennes, mais elle se heurte à une résistance acharnée lors de la Bataille du Piave. Le 24 octobre 1918, l'armée italienne (51 divisions italiennes et 7 alliés dont 2 françaises) lance une vaste offensive contre les forces austro-hongroises (63 divisions). Les Italiens parviennent à couper en deux les lignes autrichiennes dans la bataille de Vittorio Veneto. Les Autrichiens, menacés d'encerclement, reculent sur toute la ligne du front. Le 3 novembre, les Italiens prennent les villes de Trente et de Trieste. Une tête de pont de l'armée italienne pénètre en Slovénie jusqu'à la ville de Postumja. L’armée austro-hongroise, démoralisée par la désertion de nombreux contingents slaves, est vaincue. Elle perd 350 000 soldats et plus de 5000 pièces d'artillerie. L'Autriche elle-même reste presque sans défense, et l'empire Austro-hongrois est contraint de signer l'armistice le 4 novembre, à Villa Giusti dans le nord de l'Italie. Charles Ier abandonne son trône. La défection de l'Autriche-Hongrie est un coup dur pour les Allemands qui perdent ainsi leur principal allié.

 

En Allemagne, Guillaume II refuse d’abdiquer, ce qui entraine des manifestations en faveur de la paix. Le 3 novembre, des mutineries éclatent à Kiel : les marins refusent de livrer une bataille « pour l’honneur ». La vague révolutionnaire gagne toute l’Allemagne. Le 9 novembre, Guillaume II est contraint d’abdiquer. L'État-major demande à ce que soit signé l'armistice. Le gouvernement de la nouvelle République allemande le signe alors dans la forêt de Compiègne à côté de Rethondes le 11 novembre 1918 dans le train du maréchal Foch alors que les troupes canadiennes lancent la dernière offensive de la guerre en attaquant Mons, en Belgique. Ainsi, les Allemands n’ont pas la guerre sur leur territoire ; ayant campé pendant quatre ans en terre ennemie, ils imaginent mal qu’ils sont vraiment vaincus. Pour sauver les apparences, l'État-major allemand fait circuler la thèse du Coup de poignard dans le dos. Les clauses de l’armistice leur paraissent d’autant plus dures : reddition de la flotte de guerre, évacuation de la rive gauche du Rhin, livraison de 5 000 canons et 30 000 mitrailleuses, etc. Pourtant, en comparaison des dévastations causées en territoire ennemi, elles n’affaiblissent que très peu la puissance allemande. En 1918, la force d’une nation réside dans la puissance industrielle. Plus tard, les propagandistes nazis ont ainsi pu déclarer que l’armée ne s’était pas rendue et que la défaite incombait aux civils.

 

Les nations ravagées

 

L'Ossuaire de Douaumont abrite les restes de 130 000 soldats.

 

Le bilan humain de la Première Guerre mondiale s'élève à environ 9 millions de morts et environ 8 millions d’invalides, soit environ 6 000 morts par jour. Proportionnellement, la France est le pays le plus touché avec 1,4 million de tués et de disparus, soit 10 % de la population active masculine. Les pertes anglaises (colonies comprises) s'élèvent à 1,2 million de tués. Cette saignée s’accompagne d’un déficit des naissances considérable. Le déficit allemand s'élève à 5 436 000, le déficit français à 3 074 000, le déficit russe est le plus élevé et atteint 26 millions. La stagnation démographique française se prolonge, avec un vieillissement de la population qui ne cesse de croître qu’avec le recours à l’immigration. Cette dernière participe à la reconstruction d’un pays dont le Nord est en ruines. Apparaît également le phénomène nouveau des gueules, cassées, nom donné aux mutilés de guerre qui survivent grâce aux progrès de la médecine tout en gardant des séquelles physiques graves. L’intégration de ces victimes de guerre en nombre à la société doit alors se faire au moyen de nouvelles lois et d'organismes comme l'Union des blessés de la face. On compte alors en France de 10 000 à 15 000 grands blessés de la face. Au Royaume-Uni, des sculpteurs, comme Francis Derwent Wood, fabriquent des masques pour rendre un aspect humain aux soldats blessés. Les sociétés d'après-guerre vont garder les marques vivantes de la guerre de nombreuses années encore.

 

Génocide, occupation, déportations et atrocités

 

Arméniens abattus vers 1918 pendant le génocide arménien qui a fait plus d'un million de victimes.

 

La Première Guerre mondiale est aussi le premier conflit à entraîner une entreprise d’extermination et de déportation planifiées par un État de tout un peuple constituant une minorité, sous prétexte de sédition : le génocide arménien est déclenché le 24 avril 1915 par le gouvernement jeune-turc de l’Empire ottoman pour qui, officiellement, il ne s'agit que d'un transfert de la population arménienne loin du front. C'est principalement entre avril 1915 et juillet 1916 qu'entre 800 000 et 1 250 000 d’Arméniens sont assassinés, soit presque la moitié de la population arménienne ottomane. Dans le même temps, 275 000 Assyriens sont massacrés dans l'est de l'Empire ottoman, selon la même optique d'épuration ethnique. L'Empire ottoman perpètre un autre génocide pendant et après la Première Guerre mondiale, celui des Grecs pontiques. De 1916 à 1923, le massacre fait près de 360 000 victimes. La reconnaissance du génocide arménien pose encore problème au XXIe siècle, bien qu'il soit reconnu comme tel par un certain nombre de pays. Le génocide des Grecs pontiques rencontre lui aussi une reconnaissance très limitée, tout comme le massacre des Assyriens.

 

 

Monument érigé à Tamines, rappel du massacre de Tamines.

 

Pendant le conflit, des massacres surviennent également dans certains pays, en particulier en Belgique où l'armée allemande commet des atrocités envers la population civile. Le mythe du franc-tireur de la guerre de 1870 fait vite son apparition et en représailles, les troupes allemandes vont se livrer à la déportation ainsi qu'à l'exécution d'un grand nombre de civils aussi bien en Belgique que dans le nord de la France. L'occupation de ces régions est très dure pour les populations qui doivent fournir dans un premier temps les vivres nécessaires aux troupes d'occupation. De nombreux civils sont réquisitionnés pour des travaux forcés et beaucoup d'entre eux sont également faits prisonniers puis déportés en Allemagne comme par exemple 1 500 habitants d'Amiens qui sont envoyés dans des camps de travail. Certains vont rester prisonniers jusqu’en 1918.

 

L'occupation et les déportations sont accompagnées de nombreuses destructions et d'exécutions, dont la plupart se déroulent sur le territoire belge. À Tamines, le 22 août 1914, ce sont 422 personnes qui sont exécutées, à Haybes, ville détruite, 61 civils sont tués et à Dinant, ce sont 674 civils qui sont passés par les armes. À Louvain, les troupes allemandes mettent le feu à la ville et 29 personnes sont fusillées. La Belgique et la France ne sont pas les seuls pays à être touchés. La ville de Kalisz en Pologne est bombardée et incendiée par les Allemands en août 1914, des civils sont tués. Dans les ruines de la ville dévastée, dont la majeure partie de la population est partie en exode, il ne reste plus que 5 000 habitants alors qu'elle en comptait 65 000 avant guerre.

 

Hommages aux soldats

 

Tombe du soldat inconnu à Canberra, Australie.

 

Dans l'immédiat après-guerre fleurissent un peu partout des monuments aux morts pour rendre hommage aux soldats tombés au champ d'honneur. En France, on compte environ 36 000 monuments. En Allemagne, ce sont les communes et les églises qui organisent le plus souvent la construction des monuments. Ces derniers consistent le plus souvent en une liste des soldats tombés et rares sont les monuments qui arborent des symboles nationaux auxquels on préfère la feuille de chêne, la croix de fer ou une symbolique christique, l'Allemagne ayant perdu la guerre et l'Empire ayant disparu.

Les soldats des différentes nations reposent dans des cimetières et des nécropoles, comme l'Ossuaire de Douaumont. Différentes associations s'occupent des tombes et de la mémoire des soldats. Pour la France, le Souvenir français, pour l'Allemagne le Volksbund Deutsche Kriegsgräberfürsorge qui s'occupe en France de 192 lieux de mémoire, pour l'Autriche l'Österreichisches Schwarzes Kreuz, pour le Royaume-Uni et les pays du Commonwealth la Commonwealth War Graves Commission et pour les États-Unis l'American Battle Monuments Commission. Dans les différents pays, le culte du soldat inconnu est mis en place.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



22/09/2012
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