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La bataille de Verdun 2e partie

Le fort de Douaumont

A été construit en 1885 par le général Séré de Rivières. A 2 km à l'est du village de Douaumont, il se trouve à 388 m d'altitude, le point le plus haut des côtes de Meuse.

Il est le plus imposant, le plus moderne et le mieux armé des forts de Verdun. Cependant, construit à la base en maçonnerie de pierre, il a subi très rapidement une série de modifications visant à le rendre plus résistant aux nouveaux explosifs et projectiles.
En 1888, une couche de béton de 2,5 m est ajoutée au-dessus de la caserne et les casemates sont renforcées d'une dalle de béton de 1,5 m. Entre cette nouvelle couche de béton et la maçonnerie de pierre, une couche de 1 m de sable vient faire office d'amortisseur. Les parties enterrées sont recouvertes de 5 m de terre. Les murs de soutènement sont quant à eux recouverts d'une plaque métallique sur une hauteur de 5 m. Le fossé est agrandi à une largeur de 12 m de large sur une profondeur de 8 m. Il est ensuite prolongé d'un puissant réseau de fil de fer de 30 m de large.

La partie centrale du fort est constituée par la caserne. Elle s'étend sur 2 étages, un rez-de-chaussée et un sous-sol, et comporte de nombreuses salles. On trouve au rez-de-chaussée la laverie, la cuisine, la boulangerie, l'hôpital, le poste de commandement et les réserves de munitions. A l'étage inférieur, la citerne d'eau, 2 réservoirs et la réserve de poudre.

L'armement du fort a également été modernisé. De 1907 à 1909, une tourelle de canon 155 mm est ajoutée. Ce canon peut tirer des obus de 43 kg à une distance de 7 km. Entre 1911 et 1913, une tourelle de 2 canons de 75 mm, 2 tourelles de mitrailleuses ainsi que 4 observatoires blindés viennent s'ajouter à l'armement existant.

 

Ordinairement, sa garnison compte 500 hommes pouvant atteindre 800, mais par le décret du 5 août 1915, elle a été supprimée ainsi que son armement et ses approvisionnements.
Ce décret prévoie en effet le désarmement de toutes les fortifications fixes de la ceinture fortifiée de Verdun. Le commandement suprême a pensé qu'elles étaient devenues inutiles, ce qui est somme toute défendable dans la situation de la guerre en août 1915.
Cela, pour plusieurs raisons : Ces fortifications ont un rôle passif par rapport aux armées de campagnes sur lesquelles on mise tout en 1915. Elles sont pilonnées et détruites par l'artillerie lourde ; Elles nécessitent une énorme consommation de munitions qui doivent être acheminée par des voies qu'il faut sécuriser ; Ces obus lourds et la logistique qu'il faut déployer pour les acheminer en sécurité pourrait être employées plus utilement sur d'autres points du front.

Finalement, les canons des tourelles (155 et 75) du fort qui devaient également être enlevés, ont finalement été laissés en place. Leur démontage représentant quelques difficultés.

 

Historique du fort :

25 février - Perte du fort de Douaumont
Le 25 février au matin, le général de Castelnau, qui a reçu les pleins pouvoirs du général Joffre, confie au général Pétain le commandement de la région fortifiée de Verdun et des forces arrivant sur les deux rives.

Dés 8 h, le bombardement allemand s'intensifie sur les positions françaises. Il doit anéantir, écraser l'ennemi avant de violents et brusques assauts sur toute la largeur du front. L'objectif étant de pouvoir avancer uniformément et suffisamment afin de pouvoir, dans la journée, lancer une attaque à la fois par l'ouest et l'est sur le fort de Douaumont.

Le fort de Douaumont est en effet devenu un objectif essentiel pour le commandement allemand, et il compte mettre tout en œuvre pour le conquérir. Il représente un refuge sûr au milieu du champ de bataille ; un abri parfait pour stocker des munitions, reposer les troupes, soigner les blessés les plus urgents et mettre les autres à l’abri avant leur évacuation ; un point d'appui important et stratégique pour la poursuite du mouvement en direction de Verdun.
Cependant, l'ouvrage est important et fait peur aux hommes de troupes comme aux officiers : La vue de Douaumont était imposante pour les voyageurs venant du nord. Elle a vivement impressionné les troupes allemandes arrivant dans la région au commencement de février 1916 pour donner l'assaut à la forteresse de Verdun. Cette masse dominante, disaient les nouveaux venus, devait contenir une nombreuse garnison, être pourvue d'un armement puissant. Son attaque serait une grosse affaire pleine d'incertitude ; les pertes seraient lourdes. Les officiers allemands entendaient ces propos dans la troupe et s'efforçaient de réagir contre leurs effets déprimants.

 

 

Le fort de Douaumont

 

Toute la matinée, les Allemands opèrent d'importants mouvements d'infiltration dans le bois des Fosses. Vers 11 h, ils se portent à l'attaque de la cote 344 et au sud du bois des Fosses (à l'est du fort).

A midi, une seconde attaque entre Louvemont et la cote 347 permet à l'ennemi de prendre pied dans quelques maisons du village de Louvemont (à l'ouest du fort).

A 15 h, toute la ligne Louvemont - bois de la Vauche est attaquée (face au fort). L'ennemi parvient à pénétrer dans Louvemont et une violente action s'engage jusqu'à 16 h. L'armée française recule peu à peu.

A 17 h, alors que le soleil se couche, la 8e compagnie du 21e régiment d'infanterie allemand, commandée par le lieutenant Brandis, se trouve à 700 m du fort de Douaumont. De ses positions, elle aperçoit à l'horizon, la silhouette imposante du fort. Aucune activité ne semble l'animer, aucun obus n'est lancé de ses canons, il semble complètement inerte au milieu de la bataille. Par contre, autour, dans la plaine, de nombreux soldats français se replis, complètement dépassés par l'avancé allemande de la journée.

 

 

 

Alors, électrisée par cette déroute française, Brandis décide avec quelques hommes de s'avancer vers le fort. La petite troupe arrive sans encombre au réseau de barbelés, ouvre une brèche à la cisaille, descende dans le fossé à l'aide d'un tronc d'arbre.

 

Puis, voyant les tourelles du fort vide de défenseurs, qu'aucun coup de feu ne part de la tranchée de tir du rempart, les soldats gravissent la superstructure de l'édifice. Le seul danger vient des percutants allemands, la fumée est si dense que l'artillerie ne voit pas les fusées demandant l'allongement du tir.

 

 

 

Pour comprendre comment un tel événement a pu se produire, il est important d'apporter quelques précisions :

 

1 - Le front de Verdun se trouvait à plusieurs kilomètres au nord du fort de Douaumont, et il n'avait pas bougé depuis plus de 18 mois. De plus, comme nous l'avons vu au chapitre " Le désarmement des forts de Verdun ", en haut de cette page, la garnison du fort avait été supprimée et ses approvisionnements réduits. Ceci explique qu'il n'y ait eu qu'un si petit nombre d'homme dans le fort le 25 février à 17 h.
Nous pouvons trouver étonnant que les troupes françaises arrivées très récemment dans le voisinage du fort, dans la nuit du 24 au 25 par exemple, et étant soumis à un très violent bombardement, n'ont pas d'elles-mêmes prisent la décision d'aller se réfugier dans l'ouvrage. Ce qui aurait fait plus de défenseurs à l'arrivé des Allemands à 17h.

 

 
Cependant, chaque troupe qui se battait en campagne à proximité du fort était soumise comme les autres, depuis l'aurore, à de durs combats inégaux. Les officiers étaient trop occupés à défendre le secteur qui leurs avait été affecté, et ne songeaient pas à aller renforcer le fort.
De plus, ces officiers avaient appris dans les écoles militaires que les troupes de campagne et les ouvrages permanents devaient rester indépendants. Ils n'étaient pas psychologiquement formés pour aller s'enfermer dans un ouvrage.

 

2 - L'avance allemande ayant été si importante et si subite depuis le 21, les occupants du fort n'étaient pas du tout au courant de la proximité de l'ennemi. Dans le tumulte de ces 4 derniers jours, personne au commandement français n'a pensé, pris le temps ou même jugé bon de les en avertir. Aucun préparatif défensif n'a donc été fait en prévision de l'arrivée des Allemands.

 


On peut également trouver étonnant que violemment bombardé depuis 4 jours et disposant d'un si bel observatoire, les occupants du fort ne se soit pas rendu compte ni ai pris la peine de s'informer sur l'avancé allemande. De violents combats se déroulaient devant et autours d'eux, il était tout de même clair qu'il se passait quelque chose dehors.

 

Témoignage du général ROUQUEROL : La nuit n'était pas encore tombée sur les plateaux glacées de la rive droite de la Meuse, le 25 février 1916, que la nouvelle de la prise du fort de Douaumont se propageait en traînée de poudre parmi les troupes allemandes massées dans le voisinage pour une attaque devenu inutile.
Les trois mots magiques : Douaumont ist gefangen, passaient de bouche à oreille et portaient rapidement la grande nouvelle dans les cantonnements les plus éloignés. Elle y provoquait l'explosion d'un enthousiasme indescriptible.
Le bulletin allemand du 26 février annonçait pompeusement la prise d'assaut par le 24e régiment de Brandebourg du fort de Douaumont, la pierre angulaire de la forteresse de Verdun. L'Allemagne entière pavoisait et voyait luire l'espoir d'une fin prochaine de la guerre.
Dès le 25 février au soir, le fort de Douaumont reprenait, sous ses nouveaux maîtres, une activité et une conscience pour ceux qui n'ont cessé avant et pendant la guerre de dénigrer la fortification permanente jusqu'à la négation de son utilité par le décret du 5 août 1915 et ses fâcheuses applications.
L'abandon du fort de Douaumont équivaut dans l'ensemble de la guerre à la perte d'une centaine de mille hommes.
 

 

20 mai - Grande offensive pour reprendre le fort de Douaumont
Depuis la perte du fort de Douaumont, le 25 février, le G.Q.G. n'a jamais cessé d'imaginer un plan pour le reprendre. Le général Joffre a inlassablement réclamé cette offensive au général Pétain, mais ce dernier, conscient de l'infériorité de l'artillerie française sur l'artillerie allemande, a toujours tenté d'en reculer l'échéance. Le 12 avril, le général Nivelle a tout de même été missionné pour mettre sur pied un plan d'attaque. Mission qu'il a lui même confié à son subordonné direct, le général Mangin.

Tout les mois de mars et avril, le général Mangin reconsidère et repense ce plan d'attaque. C'est le 13 mai qu'il fixe définitivement le projet et en arrête les objectifs.
Ils sont : la reconquête de la tranchée Morchée ; l'enveloppement du fort de Douaumont par le nord ; la reprise de la batterie et de la tourelle 3.212 à l'est du fort, puis le fort lui même.

L'offensive est prévue pour le 22 mai. La 5e D.I. (36e, 74e, 129e et 274e R.I.) appuyée par la 36e (18e, 34e, 49e et 218e R.I.) et une puissante artillerie doivent attaquer simultanément dans un même élan. L'artillerie doit embraser les lignes allemandes durant les 7 jours qui précèdent l'attaque afin de désorganiser l'artillerie et miner le moral de l'ennemi.
Cependant, dès le 13 mai, jour où le général Nivelle rend public le projet d'attaque, la 5e D.I. allemande alors en position dans le secteur du fort de Douaumont reçoit "bizarrement l'ordre de stopper toute opération offensive et de renforcer la défense du fort. Manifestement, l'ennemi a été renseigné du projet français. Par ailleurs, il déclenche le 20 mai une contre-préparation d'artillerie qui très vite surpasse la notre.
Témoignage du général Pétain :  les troupes d'assaut subissaient, à partir du 20 mai, des pertes sensibles du fait que nous ne possédions par la supériorité du feu.

 

21 mai
La préparation d'artillerie précèdent l'attaque du fort de Douaumont se poursuit.

Le général Mangin, depuis son Q.G. recueille les rapports des généraux d'artillerie qui lui affirment que le fort de Douaumont n'est plus qu'une ruine et que l'attaque ne va être qu'une formalité.. Enthousiasme, il néglige d'envoyer des patrouilles pour vérifier l'exactitude des propos.
Témoignage de Lefebvre-Dibbon, chef de bataillon du 74e R.I. : " A la réunion qui précéda l'attaque du fort à à laquelle prirent part les officiers supérieurs de la division, le général Mangin nous avait affirmé que la préparation d'artillerie nous permettrait d'arriver au fort l'arme à la bretelle, car le fort serait complètement ané
anti.

 

Charles Mangin

 

Mangin rédige son ordre du jour : Vous aller reformer vos rangs éclaircis. Beaucoup d'entre vous iront porter au sein de leur famille l'ardeur guerrière et la soif de vengeance qui vous animent. Mais il n'est point de repos pour les Français tant que le sauvage ennemi foule le sol sacré de la Partrie ; point de paix pour le monde tant que le monstre du militarisme prussien n'est pas abattu.
Donc, vous vous préparerez à de nouveaux combats, où vous apporterez la certitude absolue de votre supériorité sur l'ennemi, que vous avez vu si souvent fuir ou lever les bras devant vos baïonnettes et vos grenades. Vous en êtes sûrs maintenant : tout Allemand qui pénètre dans une tranchée de la 5e Division est mort ou prisonnier, toute position méthodiquement attaquée par la 5e Division est une position prise !

Vous marchez sous l'aile de la victoire !

 

22 mai
Le jour se lève sur un ciel sans nuage, présageant une magnifique journée de printemps.
Vers 11 h, le général Mangin se rend à l'observatoire de Souville d'ou il domine la pleine. A l'horizon, le fort de Douaumont disparaît dans la fumé des éclatements. Les secteurs de chaque côté du fort sont également en ébullition, quoi que le feu soit un peu moins nourri à l'est.

Mangin est serein, tout semble se dérouler comme prévue.

Subitement, à 11 h 40, dans un tonnerre assourdissant, le barrage de 75 se déclenche et vient s'abattre juste devant les positions françaises, au point voulu, sur l'étendu voulu, comme un rideau magique. Le bombardement allemand n'a pas cessé pour autant.

A 11 h 50, l'attaque est lancée, toute la première ligne française sort de ses tranchés et s'élance à travers les obus allemands. Les premiers combattants tombent, mais le barrage roulant de 75 et parfaitement ajusté et progresse exactement à la vitesse voulu (particulièrement sur la droite du dispositif).

 

Voyons les différentes actions les unes après les autres :

Sur le front à l'extrême gauche:
Le 3e bataillon du 36e R.I. s'élance à l'heure H en direction de son objectif, la tranchée Morchée. Il recule une fois mais renforcé de sa 8e compagnie restée en renfort, il repart à l'assaut à 13 h et s'empare des tranchées Morchée et du Bonnet d'Evêque. 150 prisonniers allemands sont envoyés vers l'arrière et de nombreux autres tentant de rejoindre le fort de Douaumont sont abattus.
Cette réussite n'a pas été sans dommage pour le 3e bataillon et les pertes ont été cruelles. A peu près tous les officiers et sous-officiers ont été tués ou grièvement blessés.

 

Sur le front gauche:
A l'heure H, 2 bataillons du 129e R.I. et quelques éléments du Génie, s'élancent au pas de charge. Leurs objectifs sont les abords immédiats du fort. Sur ce point, la préparation d'artillerie a eu des conséquences bénéfiques car les premières lignes allemandes, les secondes et les troisièmes sont totalement dévastées. Les soldats allemands sont complètement abrutis, ils sont tués ou fait prisonniers sans résistance.
A 12 h 01, soit 11 minutes après le commencement de l'assaut, l'objectif est atteint et même dépassé. L'angle nord du fort est occupé ainsi que la face nord-ouest jusqu'à l'angle nord, le boyau Fontaine est repris, ainsi que les tranchées qui défendent la face sud.

 

Témoignage du capitaine COUMES du 129e R.I.: Les sapeurs étaient si ardents à la lutte qu'ils se trouvaient dans le flot de tête du 129e au moment de descendre dans les fossés du fort.
Pendant ce temps, la première section du génie qui comprenait au départ deux sergents et vingt-sept hommes, atteignait le fossé ouest. L'un des sergents, Lateur, était blessé au bras, mais n'avait pas voulu abandonner ses hommes. C'est l'autre sergent Piau, qui commandait la troupe.
Une fois dans le fossé, la section courut au coffre de contrescarpe nord-ouest et y entra. Le coffre était intact et vide. Il restait alors treize sapeurs autour de Piau.

 

 

 

A leur droite, d'autres éléments Du 129e qui ont pour objectif la face nord, nord-est et le flanc est du fort ne rencontrent pas la même facilité. Le bombardement allemand qui a précédé l'attaque leur a causé de lourdes pertes. Ils s'élancent néanmoins et atteignent le fossé sud-est. Une fois à cet endroit, ils sont soumis aux tirs des mitrailleuses ennemies venant du fort. Ils sont pris au piège, acculés contre la paroi.

 

Au bout d'une heure de combat, le 1er bilan n'est pas reluisant. Toutes les unités du 129e qui ont marché sur le fort sont stoppées, bloquées sur place. Comme les troupes allemandes sont toujours à l'abri dans le fort, l'artillerie allemande déclenche un furieux bombardement par obus fusant sur l'édifice. Cela cause des ravages dans les troupes françaises. Des renforts sont demandés en urgence.

 

A 13 h, la 8e compagnie du 36e R.I. est envoyée au secours du 129e R.I. D'un mouvement rapide elle parvient à franchir les 600 m qui la séparent des 1eres lignes et ne subit que peu de pertes par le tir de barrage allemand.

 


Aussitôt sur ses positions de départ, elle est envoyée vers le 129e dans les fossés du fort.
Témoignage du capitaine de PERCIN, du 36e R.I. : " Nous arrivâmes, un peu après 14 h 30, dans le fossé sud-ouest du fort, sous un bombardement terrible, que notre mouvement, visible de l'ennemi, avait eu sans doute pour effet d'intensifier, et qui nous fit subir de lourdes pertes.
A l'entrée de la brèche sud-ouest, à côté de l'entrée du fort que des combattants du 129e et du 3e génie tentaient de forcer à coup de grenades, je trouvai le lieutenant de Mussy qui s'était porté au-devant de ma compagnie. Nous nous donnâmes une chaleureuse accolade. "

 

Mais plusieurs mitrailleuses ennemies bien placées rendent la tâche très périlleuse.
Tous les hommes encore valides se mettent à creuser des éléments de tranchée allant du saillant nord-est, longeant la paroi et s'arrêtant vers l'entrée du fort (soit 200 m).

 

 

 

Photo prise le 22 mai à 15 h montrant les éléments du 129e R.I. dans la tranchée qu'ils ont ébauchée (photo prise au X rouge)

 

Dans la soirée, plusieurs attaques allemandes sortant du fort sur cette tranchée improvisée sont repoussées.
A 23 h, une section de la 5e compagnie du 34e R.I. parvient à atteindre la tranchée et vient la renforcer.


Sur le front droit (à la Caillette) :
A l'heure H, les hommes du 74e R.I. s'élancent et franchissent toutes les tranchées ennemies. Les Allemands qui s'y trouvent se rendent instantanément. La crête du fort est atteinte sans trop de difficulté et les hommes s'afférent maintenant à reconquérir un petit élément bétonné appelé  (le dépôt) qui semble fortement gardée. Après un sanglant corps à corps, l'ennemi recule et l'ouvrage est repris. Cependant, la situation est précaire et le dépôt est soumis aux feux croisés venant des cornes sud-est et nord-est du fort. Le commandant Lefebvre-Dibon décide néanmoins d'y installer son P.C.

 
Témoignage du commandant Lefebvre-Dibon, chef de bataillon du 74e R.I. :  En y arrivant un spectacle effroyable s'offrit à mes yeux. Des blessés s'y étaient traînés et se trouvaient couchés au milieu de caisses en morceaux, de paillasses déchirées, de bouteilles cassées, de fusils. Les cadavres allemands y étaient nombreux et mêlés aux débris. Tout un côté du dépôt se trouvait complètement ouvert dans la direction d'une hauteur toute proche, d'où tirait les mitrailleuses ennemies de droite, c'est-à-dire de la position que le 2e bataillon devait enlever. Aussi, les pointeurs de ces mitrailleuses, apercevant des Français se précipiter dans le dépôt dont ils voyaient le fond, commencèrent-ils à tirer dedans. Les balles ricochent sur les murs et nous frôlent quand elles ne nous atteignent pas. Avec quelques hommes qui ont pu me suivre nous nous aplatissons et, ramassant tous les matériaux que nous trouvons à portée de la main, nous élevons une barricades provisoire pour masquer l'ouverture.
Aussitôt après je commence à mettre un peu d'ordre dans l'intérieur, je fais jeter dehors tout ce qui est inutile, à commencer par les cadavres ; j'arrange des planches en lits de camp, je les garnis avec des morceaux de paillasse et j'y étends les blessés.
Toutes les grenades et munitions sont empilées à l'entrée pour former une réserve. Des sacs à terre, des enveloppes de traversins rapidement ouvertes, sont remplis de gravois pour la barricade qui s'élève et sur laquelle les Allemands continuent à tirer.
Toute liaison est rompue avec les unités à gauche et à droite. De tous les côtés, les blessés affluent au (dépôt) et nombreux sont ceux à qui les mitrailleuses allemandes infligent une nouvelle blessure, définitive celle-là. Jusqu'au soir la situation reste précaire.

 

A la nuit, le bilan est triste:
Toute la partie est du fort a échappé aux Français. Par ce côté, de nouveaux effectifs très importants et de nombreux autres qui avaient quitté le fort pour ne pas être faits prisonniers regagnent la forteresse. D'importants ravitaillements en matériel sont également acheminés.
Le secteur de la Caillette et plus particulièrement le ravin de la Mort est un véritable charnier.
Partout, les hommes qui ont attaqués aujourd'hui luttent désespérément et de façon précaire pour conserver les maigres positions qu'ils sont parvenus à conquérir.
La fatigue, la soif, la faim, la douleur physique, la désolation, l'impuissance, voilà l'enfer des combattants de Verdun.

Durant toute la nuit, le bombardement se poursuit de part et d'autre. Du côté allemand, il est beaucoup plus violent et étendu.
Sur ordre du général Lebrun, le reste de la 36e D.I. monte en ligne.

 

23 mai
A 7 h, le commandant de Vulpillières du 34e R.I., sous les ordres du général Mangin, prend le commandement du secteur de Douaumont. Il a sous ses ordres les survivants de tous les régiments qui ont attaqué la veille.

Dès 9 h, les Allemands bombardent avec force les nouvelles positions tenues par les Français et le fort lui-même. Les pertes continuent à s'accroître de manière inquiétante. Dès lors, la reprise du fort de Douaumont paraît impossible.

Plusieurs attaques allemandes sont tentées sur le dépôt et la tranchée construite le long de la superstructure du fort. Elles ne donnent aucun résultat mais les unités françaises qui défendent sont à bout de force.

Témoignage du sergent Piau, du 129e R.I. : " A 4 h 30 du matin, un dizain d'Allemands s'avancent par le couloir de la tourelle et nous attaquent à la grenade, mais nous en avons aussi et ils sont facilement repoussés.
A 5 h 30, nous les voyons, en grand nombre cette fois, avancer sur toute la ligne, par infiltration, à travers les trous d'obus… presque tous nos coups portent et je suis certain que beaucoup d'Allemands ont été tués ; ils sont tellement nombreux que, jusqu'à 8 h 30, ils arrivent par trois fois jusqu'à 25 mètres de notre ligne, mais là, des volées de grenade leur font rebrousser chemin.
Vers 7 heures, nous avons reçu quelques obus asphyxiants que j'ai crus envoyés par notre artillerie, mais je ne pourrais l'affirmer. Il à fallut mettre les masque à gaz à trois reprises.

 

Soldats portant des masques à gaz

 

A 8 h 45, les Allemands reviennent, ils sont au moins 600 hommes ; j'envoie un coureur au commandant Mangin lui demandant et du renfort et un tir de barrage sur le nord du fort, sans quoi je ne pourrai plus tenir.
Quelques minutes plus tard, le tir de barrage commence avec une précision merveilleuse ; alors que les Allemands étaient à 40 ou 50 mètres de nous, les obus leur tombent en plein dessus et le résultat ne se fait pas attendre, les Allemands reculent.
Vers 9 h 30, une compagnie s'avance pour me renforcer, mais elle a été signalée à l'artillerie allemande, car, au moment où elle aborde le fort, les Allemands déclenchent un effroyable tir de 105 percutants sur les abords et la partie du fort que nous tenons et cette compagnie, la 6e du 34e, est presque anéantie. Ce tir dure une heure, j'ai aussi plusieurs tués et blessés, et je suis blessé de nouveau moi-même à la figure et à la main gauche, peu grièvement, mais je perds beaucoup de sang. Je suis à bout de forces.

Toute l'après-midi, les éléments des 129e, 36e et 34e tentent de se maintenir dans le chaos, écrasé sous le feu des fantassins et de l'artillerie allemande, l'épuisement et la soif venant accroître leur calvaire.

Au soir, du côté français, les pertes de la journée ont été terribles. Partout, devant et derrière, les sifflets des blessés retentissent mais malheureusement, personne ne peut leur venir en aide.
Témoignage de Alfred SALABELLE, soldat au 74e R.I. : " Le 22 mai, engagé volontaire à 17 ans, je pars avec le 74e à l'attaque du fort de Douaumont. Bientôt, je suis blessé par un éclat d'obus qui me fracasse la hanche gauche ; je suis mis à l'abri dans un trou d'obus et reste là jusqu'au soir. La soif commence.


Au matin du 23 mai, je suis relevé et porté au ravin de la Caillette. Là, on me remet dans un trou en me disant qu'il y a un poste de secours tout près et que d'autres brancardiers viendront me chercher. Effectivement, dans la matinée du 23, un major vient constater ma blessure et repart en disant qu'il reviendra dans quelques instants faire le pansement. Jamais je ne le reverrai.
Je demeure ainsi pendant trois jours sans manger ni boire. Le troisième jour, on met à mes côtés un deuxième soldat blessé aux jambes de plusieurs balles de mitrailleuses, et un troisième qui meurt aussitôt. Mais aucun secours ne vient. Le quatrième jour, le 26 mai, le bombardement est terrible. L'aumônier Etcheber qui passe par-là, se jette dans le trou pour se garer des éclats. Il se trouve qu'il est du même pays que le blessé aux jambes et ils parlent en patois des Pyrénées. Le pauvre diable se confesse et reçoit l'absolution. Se tournant ensuite vers moi, l'aumônier me demande si je veux son secours. Je ne peux accepter, n'étant pas baptisé. L'aumônier me baptise puis s'en va en me laissant sa gourde.
Ce n'est que le sixième jour, au matin, que deux brancardiers passant par-là, me relèvent et m'évacuent sur Landrecourt. Donc pendant ces six jours, je suis resté sans pansement sans nourriture, avec à peine de quoi boire. Pour calmer ma fièvre, je mettais des sacs vides sur la terre et ensuite m'en couvrais la figure afin de me rafraîchir. "

 

24 mai

Dès 7 h, l'artillerie ennemie s'acharne avec force sur tout le plateau de Douaumont.
Les éléments restant des 2e et 3e bataillons du 34e R.I., qui ont subi des pertes considérables ces 2 derniers jours, sont arrivés à la limite de leur force. Ils tentent de se replier vers les lignes françaises pour rejoindre les éléments des 18 et 49e R.I. qui sont arrivé dans la nuit.
Témoignage du capitaine Monneret, du 34e R.I. : Au petit jour, en ce matin du 24 mai, la situation nous apparaît avec une netteté effrayante ; nous sommes entourés.
Nous faisons feu partout ; et alors, commence un de ces duels tragiques, trop souvent ignorés dans cette guerre, duel où l'un des partis, condamné d'avance, n'a plus que la suprême ressource de bien mourir !
Exposés à tous les coups, mes hommes tombent les uns après les autres. Ils meurent silencieusement. Je reçois une balle dans le bras droit.
Les Allemands, trouvant encore que cela ne va pas assez vite, ont installé des minenwerfer à 400 mètres de là, et à chaque instant, d'énormes torpilles ouvrent des cratères sur toutes les faces.
Seuls me restent quelques hommes perdus dans les trous d'obus et qui n'ont plus de munitions. Il doit être midi. Les Allemands, pressentant que nous sommes à bout, s'élancent de tous côtés.


Une mêlée atroce se produit. Rassemblant mes dernières forces, suivies d'un petit groupe, je tente de percer vers les lignes françaises. Nous roulons dans le fossé. Mon bras me refuse tout secours, j'ai perdu mes armes. Des mitrailleurs brandebourgeois se précipitent et nous font prisonniers.
Nous pleurons de rage ! Nous avions résisté plus de trente heures.

Le dépôt est toujours soumis aux assauts allemands. A 12 h, l'ennemis sort du fort et se lancent à l'attaque. A 13 h 30, le 3e bataillon du 74e R.I. est complètement encerclé, mais tient toujours. A la fin de la journée, sans minutions, sans vivre ni eau, harassés par 2 jours de combats incessants, sans espoir de secours, les hommes du 3e bataillon se rendent.

 

 

 

 

Le bilan de la bataille de Verdun

La bataille de 1916 a fait plus de 700.000 victimes : 306.000 tués et disparus (dont 163.000 Français et 143.000 Allemands), environ 406.000 blessés (dont 216.000 Français et 190.000 Allemands). Parmi les chiffres les plus divers et les plus excessifs cités à propos des pertes de Verdun, c'est ce qui, en ordre de grandeur, paraît le plus proche de la réalité... Cette bataille (destinée à "saigner à blanc l'armée française") a finalement coûté des pertes quasiment identiques dans les deux armées adverses.

 

 

 

30 millions d'obus allemands et 23 millions d'obus français de tous calibres sont tombés sur quelques dizaines de kilomètres carrés. Chaque jour du côté français, une moyenne de 100 000 projectiles labouraient le champ de bataille ; les jours d'attaque, ce chiffre était doublé (lors de l'offensive du 24 octobre 1916, l'artillerie française a tiré 240.000 projectiles).

 

Sur le champ de bataille, autour de Verdun, neuf villages furent détruits: Beaumont, Bizonaux, Cumières, Douaumont, Fleury, Haumont, Louvemont, Ornes, Vaux ; les habitants, 3000 au total, ayant fui avant le mois de février 1916.
Dès la fin de la guerre, se pose le problème de la désignation de cet espace dont la remise en état paraît difficile, voire impossible, pour des raisons techniques, économiques et morales.
Dès 1919, l'Etat se rend acquéreur de ces territoires jugés irrécupérables. Ainsi la "Zone Rouge" est-elle constituée, une appellation générique sans rapport symbolique avec le sang versé ou la puissance de feu déployée mais due simplement, semble-t-il, au traçage en rouge sur les plans cadastraux de la délimitation de ces terrains !
Ces villages martyrs sont considérés comme de véritables communes dirigées par des commissions municipales (pour huit d'entre eux), chargées de perpétuer leur mémoire. Une chapelle a été érigés sur chacune d'entre elles, ou chaque année, le jour de la fête nationale, les anciens habitants s'y rassemble et prient pour leurs défunts. Le statut administratif de ces villages "fantômes" constitue un cas unique en France !

 

Au total, on s'est battu autour de Verdun du début à la fin de la guerre, la bataille de 1916, dite "bataille de Verdun" ayant été un temps fort de tous ces combats de 1914 à 1918. Elle dura 300 jours et 300 nuits. Mais cette bataille joua un rôle décisif dans la victoire finale dans la mesure où les Allemands, ayant connu un échec dans leur tentative de percer le front à Verdun, se sont alors lancés dans la guerre sous-marine provoquant ainsi l'entrée en guerre des Etats-Unis ; ce qui modifia le rapport de force en faveur des Alliés.

 

Cette bataille franco-allemande (où furent engagées d'importantes forces coloniales), a été en définitive non seulement une bataille de France importante, mais bien la bataille de la France, puisque près des 3/4 de l'armée française ont combattu à Verdun.
De ce fait, elle est devenue d'emblée, dans la conscience nationale, le symbole de la Grande Guerre qu'elle résume et dont elle marque à la fois le sommet et le tournant. La ville de Verdun devenant son lieu de mémoire éminemment symbolique.

A l'Armistice de 1918, l'évêque de Verdun, Monseigneur GINISTY et le général VALANTIN, gouverneur de Verdun, parcourent l'ancien champ de bataille et remarquent de nombreux ossements de soldats tombés en 1916.

 

Ils ont alors l'idée de rassembler tous ces ossements en un lieu unique. Un monument du souvenir et une nécropole contenant à la fois les restes des combattants inconnus et les tombes des soldats enterrés durant la bataille de Verdun. Un lieu sacré permettant à toutes les familles de venir se recueillir et prier pour leurs défunts. Cet emplacement est choisi sur la commune de Fleury.

Dés 1919, une " baraque " en bois est construite sur la crête de Thiaumont afin de commencer le rassemblement des ossements et servir ainsi d'Ossuaire temporaire.

 

 

 

Le 7 août 1932, l'Ossuaire est inauguré en présence du président de la République, Albert LEBRUN.
Il est l'œuvre de 3 architectes, Léon AZEMA, Max EDREI et Jacques HARDY. Il se présente sous la forme d'un couloir de 137 m de long, où s'alignent, en alvéoles, les tombeaux de granit surmontant les caveaux. En son centre, s'élève une tour de 46 m de haut avec en son sommet une cloche de 2,3 tonnes qui résonne les jours de cérémonies importantes, ainsi qu'un phare, lanterne des morts, qui rayonne sur le champ de bataille.
Il possède une chapelle catholique ou reposent l'abbé Noël, ancien aumônier militaire, premier chapelain de l'ossuaire, et Monseigneur GINISTRY, décédés 1946.
 



30/09/2012
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