Bataille d’Arras
Date 1er-4 octobre 1914
Lieu Arras, France
Issue indécise
Belligérants
République française Empire allemand
Forces en présence
Xe Armée française VIe Armée allemande et trois Corps d'Armée
La bataille d'Arras (également connue sous le nom de première bataille d'Arras ou bataille de l'Artois), est une bataille qui débuta le 1er octobre 1914, avec une tentative de l'Armée française de déborder l'Armée allemande, pour l'empêcher de se déplacer vers la Manche pendant la Course à la Mer, au début de la Première Guerre mondiale.
La Xe Armée française, commandée par Louis Maud'huy, attaqua les troupes allemandes qui progressaient vers le nord-ouest, le 1er octobre, connaissant un certain succès jusqu'à ce que la ville de Douai soit atteinte. Là, la VIe Armée allemande du kronprinz Rupprecht lança une contre-offensive, aidée par trois Corps des Ie, IIe et VIIe Armées allemandes. Les Français furent alors contraints de se retirer sur Arras.
L'échec français à repousser l'offensive allemande se termina par la prise de la ville de Lens, le 4 octobre, et permit aux Allemands de se déplacer davantage vers le nord, vers les Flandres. Les Français, cependant, réussirent à tenir Arras.
Les prisonniers de guerre allemands
Les émotions ressenties au moment de leur capture sont gravées sur les visages des nouveaux prisonniers de guerre. La peur y est inscrite : « Ma vie est maintenant entre les mains de l’ennemi. Me laissera-t-il la vie sauve? » On peut y voir l’espèce de stupeur qui saisit celui qui vient d’échapper à l’enfer de la guerre. Il y a du soulagement : « Au moins, je ne suis plus au combat ». Il y a de la culpabilité : « Aurais-je pu faire plus pour éviter d’être capturé? » Mais c’est l’épuisement qui domine.
La peur s’est probablement présentée la première, car le moment de la capture est le plus dangereux pour le prisonnier. Il est vrai que, pendant la Première Guerre mondiale, les dispositions de la Convention de La Haye de 1907 sur la protection des prisonniers de guerre n’ont pas toujours été observées au front. Jeter son arme et crier Kamarad ne garantit pas que l’appel à la clémence sera entendu, surtout si l’unité du soldat qui fond sur vous a été décimée par le feu ennemi. Parfois un peloton, affaibli par les pertes humaines et s’acharnant à tenir une position chèrement acquise, ne peut se passer de fantassins pour accompagner les captifs vers l’arrière. Les soldats comprennent alors implicitement que la meilleure solution est d’abattre les prisonniers sans en rien ne dire à personne.
Et puis, il y a ces rumeurs qui courent d’un bord à l’autre de la ligne de feu voulant que tel ou tel bataillon ne fasse pas de quartier ou préfère tuer les prisonniers plutôt que de les mettre en sûreté dans un camp. Un soldat exalté par de telles histoires peut ne pas vouloir entendre l’appel à la clémence de son ennemi et appuyer sur la gâchette. Les visages que vous voyez sur ces films sont donc les visages des chanceux, des soldats qui ont survécu à leur capture.
Il faut aussi savoir qu’il peut exister une certaine sympathie entre les soldats. Des atrocités sont commises de part et d’autre, et souvent la vue d’un ennemi terrorisé inspire la pitié chez l’autre. Il est possible que le soldat qui s’apprête à faire un prisonnier ne le voie pas sous les traits du Hun démoniaque décrit par la propagande de guerre, mais sous ceux d’un homme comme lui, qui a une famille, peut-être une femme et des enfants. Ils sont tous les deux engagés dans une guerre qu’ils n’ont pas souhaitée. Il le traitera comme il aimerait être traité, avec gentillesse et respect.
Certes, le Canadien épuisé qui partage son café et son pain avec un prisonnier allemand fait une belle image de propagande, mais rien ne dit que ce genre de chose ne s’est jamais produit. Or, c’est bel et bien le cas. Nombre de soldats ont partagé une bouteille d’eau, leurs rations ou une cigarette avec l’ennemi capturé, parce que pour eux, le fait qu’il s’agisse d’un combattant prime sur le fait qu’il soit leur ennemi. Il y a une bonne humeur authentique dans l’image du soldat qui fait le clown en empruntant le calot de son prisonnier et en faisant des grimaces.
Une fois capturé et arrivé dans un lieu relativement sûr, le prisonnier vit en captivité de manière assez semblable à tous les autres prisonniers de guerre. La Première Guerre mondiale a reposé beaucoup sur l’effort humain. Il s’agit de la première guerre véritablement mécanisée, mais le plus gros du travail est encore effectué à l’ancienne, par des milliers d’hommes qui creusent, portent, soulèvent et déplacent. Aucun des adversaires n’a de scrupule à mettre les prisonniers au travail forcé, sur le front et à l’arrière. On sait que les unités allemandes ont utilisé leurs prisonniers de guerre pour creuser des tranchées, transporter des munitions et porter le ravitaillement – toutes tâches interdites par le droit international – et il est possible que les Canadiens aient fait de même. Mais de telles scènes n’auront pas été filmées. On voit plutôt communément l’image de soldats allemands faisant office de brancardiers, transportant des blessés vers l’arrière, des Canadiens comme des Allemands. Faire des prisonniers présente l’avantage de libérer des fantassins temporairement affectés au transport des blessés. Chaque prisonnier allemand servant de brancardier libère un soldat canadien qui peut retourner en première ligne. Mais les prisonniers y voient aussi un avantage. De nombreux récits contemporains font état de prisonniers qui veulent presque désespérément se montrer utiles en aidant les blessés. Après tout, mieux vaut porter une civière que se faire tuer.
Les prisonniers sont aussi une source précieuse d’information. On les fouille pour trouver des cartes, des documents ou tout ce qui pourrait avoir valeur de renseignement militaire (ou même valeur marchande – les soldats canadiens sont réputés pour être des collectionneurs invétérés; ils s’emparent de tout article qui peut être vendu aux troupes non combattantes restées à l’arrière). Les armes, gourdes et autre matériel militaire sont confisqués et envoyés vers les dépôts de récupération. Puis, des officiers parlant allemands interrogent les prisonniers sur leur unité et les défenses ennemies. Il est probable que peu de prisonniers de guerre ont été aussi utiles que ceux qu’on voit dans le film (y compris celui qui semble dur d’oreille, sans doute à la suite d’un bombardement d’artillerie), mais les preuves semblent indiquer que les prisonniers n’hésitaient pas vraiment à donner des renseignements sur ce qui se passait dans leurs propres tranchées.
Finalement, il ne faut pas sous-estimer la valeur symbolique des prisonniers. Il importait de filmer des prisonniers allemands parce qu’ils étaient des signes manifestes du succès obtenu sur le champ de bataille. Pendant les bains de sang de 1916 et 1917, quand le succès se mesurait au nombre de mètres de terre pulvérisée, des scènes montrant quelques soldats allemands débraillés prouvaient que quelque chose de concret se produisait vraiment. On connaît tous la bataille de la Somme, par exemple, et le nombre effarant de morts qu’il a fallu pour gagner un tout petit bout de terrain, mais dans cette séquence, la vue de prisonniers quittant le champ de bataille signifiait au moins qu’il y aurait quelques fantassins ennemis de moins pour tirer sur des soldats canadiens.
Lors des campagnes à découvert qui ont commencé à l’été de 1918, les prisonniers sont devenus des preuves encore plus évidentes de succès remporté sur le terrain. On pouvait enfin montrer à la population canadienne des images de longues files de soldats allemands capturés sur le champ de bataille à mesure que le Corps expéditionnaire canadien balayait le nord de la France. Des scènes où des prisonniers de guerre quittent en rangs serrés la bataille dont l’enjeu était le bois de Bourlon en 1918, ainsi que des images montrant des rangées de pièces d’artillerie capturées, confirment à la population restée au pays que le vent a enfin tourné. Les Alliés mettent les Allemands en fuite, et de telles images semblent prouver que les prisonniers sont peut-être tout aussi heureux de se rendre que de combattre.
On n’a jamais pu évaluer exactement le nombre de prisonniers allemands faits par les troupes canadiennes. On sait que plus de 4000 ont été capturés sur la crête de Vimy en avril 1917, plus de 5000 le 8 août 1918, premier jour de la bataille d’Amiens, et quelque 6000 pendant les trois jours qu’il a fallu pour prendre la ligne Drocourt-Quéant, en septembre 1918. Mais il ne s’agit là que de trois parmi les dizaines de batailles menées par les divisions canadiennes, et le nombre total de prisonniers ne sera peut-être jamais connu. De toute façon, la froideur des chiffres nous en dit moins sur la captivité que ces images émouvantes. Les hommes que nous voyons demeurent anonymes, mais leurs visages témoignent des effets de la guerre sur les individus.
Des allemands, faits prisonniers par les Canadiens, se rendent au camp de détention d’Arras
Prisonniers capturés par la cavalerie arrivant à la ligne canadienne, vers 1918
La vie dans les tranchées
La puissance de feu massive des nouvelles armes perfectionnées, comme l’artillerie à tir rapide, les mitrailleuses et les fusils, tua des centaines de milliers de personnes durant la première phase de la guerre, à la fin de 1914. Fauchés au sol, les soldats n’eurent d’autre choix que de se réfugier sous terre pour échapper à cet assaut mortel de plomb et d’acier.
De la Suisse jusqu’à la mer du Nord, sur une longueur de 500 kilomètres, les soldats des deux camps creusèrent dans le sol des fossés de plus en plus complexes, de plus en plus profonds. En 1915, de vastes cités souterraines abritaient les soldats, alors que les armées ennemies s’affrontaient dans le no man’s land, la zone séparant leurs premières lignes respectives. Le long de cette ligne ininterrompue de tranchées, les opérations offensives se transformaient en attaques frontales, auxquelles un tir de concentration dévastateur venait généralement mettre fin.
Le front Ouest, comme on l’appelait, était constitué d’une série de tranchées profondes. Derrière les tranchées bien protégées de la ligne de feu se trouvaient des tranchées d’appui et de réserve reliées par des tranchées de communication perpendiculaires au front. Le long des tranchées de première et de dernière ligne, des abris profonds protégeaient d’à peu près tout, sauf d’un tir d’artillerie direct. Des sapes et des postes d’écoute étaient aussi creusés dans le no man’s land, d’où des soldats pouvaient prévenir d’une attaque ennemie.
En dépit de leur insalubrité, les tranchées de première ligne étaient des zones de sécurité. Elles protégeaient contre le tir d’armes de petit calibre, le shrapnel et les obus explosifs. Chaque jour et chaque nuit, les soldats consolidaient les murs qui s’effritaient, remplissaient les sacs de sable et réparaient les sections endommagées par le feu d’artillerie. La guerre se faisait non seulement avec des mitrailleuses et des fusils, mais avec des pelles.
La vie dans les tranchées était remplie de longues périodes d’ennui parsemées de moments de terreur. Les tâches routinières occupaient la majeure partie du temps. Une demi-heure avant l’aube, les fantassins devaient sortir des abris profonds ou des trous creusés dans les murs des tranchées et se mettre au garde-à-vous. En cas d’alerte, ils attendaient, baïonnette au canon, une attaque éventuelle. Si rien ne se passait – et c’était souvent le cas, car à ces moments-là l’infanterie des deux camps était toujours très bien préparée –, les officiers passaient les hommes en revue. Ils vérifiaient si les fusils étaient rouillés; ils s’assuraient également que les soldats avaient porté des chaussettes sèches afin de prévenir le « pied de tranchées », un type d’engelure résultant d’un long séjour dans le froid et l’humidité et pouvant nécessiter, dans les cas graves, une amputation des orteils ou des pieds. Après l’inspection, les soldats recevaient souvent une petite dose de rhum, qu’ils appréciaient beaucoup et qui les aidait à supporter leurs frustrations quotidiennes.
Le déjeuner, comme la plupart des autres repas, était généralement composé de bœuf en conserve, de confiture et de biscuits. Le régime était monotone, mais les soldats mangeaient à leur faim. Au dîner, pour varier et réconforter un peu, on servait de la soupe ou du ragoût provenant des zones arrière. Les colis expédiés par les familles et remplis de fromage, de pain et de sucreries compensaient pour la fadeur de la nourriture habituelle. Durant la journée, la plupart des soldats n’avaient qu’un but : éviter le sergent qui assignait les corvées de tranchées. Peu y parvenaient, et les soldats passaient une grande partie de leur temps à reconstruire les tranchées ou à monter la garde.
Malgré ces tâches, les soldats avaient beaucoup de temps libre, qu’ils passaient à rêver de leur foyer et des êtres chers qu’ils y avaient laissés; ils s’inquiétaient de leurs enfants qui grandissaient sans père, de leurs parents malades sans personne pour les soigner ou de leur femme qui s’efforçait de nourrir la famille avec le peu d’argent qu’elle avait. Ceux qui savaient lire et écrire pouvaient passer quelques heures à écrire des lettres. Et quand ils recevaient une réponse, ils la lisaient et la relisaient avec grand bonheur. Ces échanges permettaient d’entretenir un lien vivant entre le Canada et les tranchées. Bien que soumis à une double censure – celle des officiers du front et celle des autorités anglaises –, les soldats essayaient néanmoins de communiquer leurs pensées à leurs proches. Les civils ne pouvaient pas tout comprendre et les soldats eux-mêmes avaient du mal à trouver les mots pouvant décrire l’étrange expérience qu’ils vivaient, mais les lettres demeuraient un important moyen d’expression.
Le jeu était une façon de combattre l’ennui, et il se trouvait toujours un filou avec des dés ou des cartes, prêt à plumer ses camarades. Si un soldat n’avait pas d’argent, il avait au moins des cigarettes. Les soldats fumaient tout le temps et les cigarettes, fournies par l’armée, achetées dans les zones arrière ou envoyées par des proches, procuraient une distraction utile. Elles aidaient les soldats à se calmer les nerfs – c’est du moins ce qu’ils disaient – et elles aidaient sans doute aussi à masquer la forte odeur des corps non lavés.
Il n’y avait pas de bains dans les premières lignes et les soldats portaient les mêmes vêtements pendant au moins une semaine. La poussière et la boue faisaient partie de la vie et, l’hiver, elles aidaient à garder les soldats au chaud. L’infestation par des poux était, elle, beaucoup plus éprouvante. Les poux vivaient dans les coutures des vêtements et se nourrissaient de sang humain. Les soldats se grattaient jusqu’au sang pour venir à bout de cet ennemi infernal. Ils apprirent à se débarrasser momentanément de ces parasites en faisant rouler une chandelle sur les coutures de leur chemise. Cela faisait sortir les poux, qu’ils pouvaient alors écraser entre le pouce et l’index. Pendant cette activité, les soldats, assis, bavardaient, se plaignaient et potinaient. Mais les poux revenaient toujours les tourmenter, jour et nuit.
Les rats étaient aussi une plaie constante et comme ils se nourrissaient de cadavres, ils pouvaient devenir aussi gros que des chats. Ils mordaient les soldats et couraient sur leurs visages pendant leur sommeil. Les soldats leur faisaient la chasse avec, généralement, des chiens terriers, mais les rongeurs vivaient tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des tranchées et continuaient de proliférer. On les entendait couiner à travers tout le champ de bataille.
Au milieu de la boue et de la gadoue en hiver, au milieu de la chaleur et des moustiques en été, les soldats ont créé une certaine culture de tranchées. Certains pouvaient sculpter une œuvre d’art à partir de munitions utilisées. D’autres s’essayaient à la poésie. Tous n’étaient aussi doués que les réputés poètes de guerre John McCrae, Wilfrid Owen et Siegfried Sassoon, mais cette poésie des tranchées ou ces vers de mirliton étaient très révélateurs de la vie des soldats au front. Certains bataillons ont publié des journaux de tranchées. Mettant à profit l’expérience de certains de leurs soldats – qui, dans le civil, étaient éditeurs, journalistes ou caricaturistes –, ils ont fabriqué des journaux rudimentaires dans lesquels on retrouvait un humour grinçant ainsi que des commentaires ironiques sur le monde étrange et souterrain des tranchées.
Mais, au moment même où il écrivait une lettre ou contemplait le ciel bleu, un soldat pouvait être tué soudainement par un obus. L’ennemi était toujours là pour tuer ou mutiler. Des tireurs isolés rôdaient furtivement dans le no man’s land, camouflés et prêts à tirer une balle sur toute tête apparaissant ne fut-ce qu’une seconde, au-dessus du parapet de la tranchée. Des gaz toxiques étaient lâchés sous forme de nuages ou lancés au moyen d’obus d’artillerie, et les soldats qui ne pouvaient mettre leur masque à gaz assez rapidement étaient voués à une mort lente pendant laquelle les produits chimiques allaient infecter et ravager leurs poumons.
Des balles de mitrailleuses balayaient les premières lignes jour et nuit. Mais les obus d’artillerie furent les plus dévastateurs durant la guerre, plus de la moitié des pertes humaines leur étant attribuable. Les obus explosifs perçaient des trous profonds dans le sol et détruisaient les tranchées; les soldats qui étaient directement touchés étaient pulvérisés. Tout aussi meurtrier, le tir de shrapnel faisait pleuvoir sur les soldats des centaines de balles métalliques et de projectiles d’acier déchiqueté qui transperçaient la peau et les os. Le port du casque d’acier, à partir du début de 1916, aida à réduire les blessures, mais une unité en service aux premières lignes s’en tirait rarement sans un cortège de blessés. On appelait cela cliniquement du « gaspillage », et des graphiques impersonnels montraient que chaque mois l’infanterie devait s’attendre à perdre 10 pour cent de ses effectifs, même dans des zones tranquilles où aucune opération n’était menée. Pendant que les tireurs isolés et les artilleurs accomplissaient leur sale besogne, les soldats voyaient leurs meilleurs amis mourir ou être blessés à côté d’eux.
Mais les soldats ripostaient en lançant des attaques nocturnes. Portant des vêtements sombres et armés de revolvers, de grenades, de poignards et de massues, de petits groupes d’hommes se faufilaient de l’autre côté de leurs barbelés dans le no man’s land. Ces raids étaient une forme d’agression organisée dont le but consistait à recueillir des renseignements, à tuer l’ennemi et à capturer un prisonnier. Ils avaient généralement pour cibles les sentinelles ennemies, mais parfois de grands groupes de commandos se glissaient dans les tranchées ennemies pour y faire un carnage. Les soldats canadiens acquirent la réputation de commandos féroces, mais ces opérations étaient dangereuses et, dans la confusion d’un combat de nuit, les pertes étaient souvent très lourdes.
Pour soulager les soldats de l’incessante pression qu’ils subissaient, l’affectation aux premières lignes se faisait par rotation. Après une période de service de quatre à six jours, les soldats, sales, couverts de vermine et épuisés, passaient dans les lignes secondaires, puis dans les lignes de réserve. Cette rotation aidait à réduire la tension, mais les soldats savaient qu’ils allaient retourner dans les tranchées, dans ce cycle infernal.
L’endurance était la clé de la survie, et les soldats apprirent à survivre dans des conditions inhumaines. Certains devinrent fatalistes, croyant qu’ils seraient tués « quand leur numéro serait tiré »; d’autres éprouvaient une terreur constante; quelques-uns espéraient subir une blessure – une balle dans la main ou dans la jambe – qui les sortirait de l’horreur et les emmènerait dans un hôpital propre. Des milliers de soldats de l’infanterie ont fait une dépression nerveuse, mais des centaines de milliers d’autres ont appris à supporter la tension inhérente aux tranchées. Et ce sont ces survivants qui, après quatre années de rudes combats, allaient finalement ouvrir une brèche dans le front Ouest et vaincre les forces allemandes.